Marcel GARRIGOU-GRANDCHAMP – 22 février 2025

Que ce soit en entraide syndicale ou ordinale (comme pour le réseau ASRA : https://reseau-asra.fr/), pas une semaine sans conseiller un professionnel de santé (PS) victime d’une agression avec parfois des suites sévères à type de syndrome post traumatique.

Au delà des communiqués, les organisations professionnelles et les institutionnels doivent s’attaquer à ce problème qui, au delà des dégâts humains, décourage à l’installation les jeunes et favorise la désertification de certains territoires.

1) D’expérience, je peux déjà apporter quelques conseils préventifs en limitant les facteurs de risques, d’autant que la féminisation de la profession est accompagnée de nouvelles menaces (d’agressions sexuelles, de viols…) :

  • L’exercice solitaire sans secrétariat et/ou en accès libre surtout au delà des horaires conventionnels. Préférer la consultation sur rendez-vous dans une structure de groupe.
  • Si vous optez pour une prise de rendez-vous en ligne, ne pas accepter les soins non programmés (SNP) via l’agenda en ligne mais uniquement après régulation par le 15.
  • Identifier les patients à l’entrée : interphone, visio phone ; vidéo surveillance dans la salle d’attente (signalée par affichage pour la légalité).
  • Ne pas recevoir dans le cabinet de consultation le patient déjà agressif en salle d’attente.
  • Interrompre la consultation immédiatement en cas de menaces et à fortiori de violences verbales ou physiques. Et dans ces cas ne pas hésiter à contacter les forces de l’ordre via le 17.

2) Comment gérer les suites de violences :

  • Déclarer systématiquement à l’Ordre les violences en appelant votre CDOM et/ou en renseignant le formulaire en ligne sur le site du CNOM : LIEN
  • Déposer plainte auprès des forces de l’ordre ; pas une main courante mais une plainte nominative (le professionnel connaît généralement l’identité de l’agresseur) ou contre X (si l’identité n’est pas connue). En cas de refus d’enregistrement, demandez l’appui du CDOM ou adressez une LR+AR au procureur de la république. Ne pas hésiter à se porter « partie civile » pour éviter le classement sans suite de la plainte.
  • Contactez votre assureur RCP (vous disposez généralement d’une garantie défense-recours et d’un avocat qui pourrait vous être utile pour la suite).
  • En cas de vol de documents (ordonnances, imprimés…) le signaler lors de la plainte, et prévenir votre CPAM, l’ARS et l’URPS pharmaciens (en cas de vol d’ordonnances et notamment des formulaires ALD sécurisés).
  • Bien entendu mettre fin à la prise en charge du patient agressif en le prévenant par une LR+AR et lui précisant de communiquer les coordonnées d’un autre médecin afin de lui adresser son dossier pour la continuité des soins en respect de l’art R4127-47 du code de la santé publique.

3) Et au delà ?

On fait quoi ? 

On attend la prochaine agression pour rédiger encore et encore des communiqués ? 

Alors que certaines mesures paraissent indispensables pour lutter contre ces agressions et je propose ici quelques pistes en direction de l’Ordre et des pouvoirs publics :

  • Dans chaque département les professionnels de santé devraient disposer d’un numéro de téléphone d’alerte pour contacter les forces de l’ordre en cas de problème.
  • Les CDOM devraient se porter systématiquement « partie civile » en cas d’agression d’un médecin, et mettre à disposition du professionnel un avocat.
  • A la chancellerie de rappeler les violences volontaires AGGRAVÉES détaillées au niveau de l’Art. 222-13 du code pénal : «  … violences sur mineur de moins de 15 ans, sur personne vulnérable, sur ascendant, sur un magistrat, un juré, un avocat … Sur un enseignant… sur un agent d’un exploitant de réseau de transport public de voyageurs … sur un professionnel de santé, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions … » 

Même en l’absence d’Incapacité Totale de Travail (ITT) ou pour une ITT < 8 jours,  « Les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.. »

  • Aux parlementaires d’introduire des peines minimales automatiques qui serait dissuasives en cas de violences aggravées.

Sans mesures vigoureuses ces situations vont se multiplier et les victimes finales en seront les patients qui auront de plus en plus de mal à trouver un médecin !

Je vais donc diffuser ce document aux ministères concernés, au président du CNOM et aux députés de ma région en vous demandant de faire de même dans la votre.